Cela devient une habitude. Une très mauvaise habitude à vrai dire. Bien entendu, les
réseaux sociaux ne sont pas l'exacte représentation de la société dans son ensemble, mais ils donnent une image du Front de Gauche détestable ! Ils n'en reflètent qu'un aspect, et pas toujours le meilleur. Je m'explique. Cette semaine a été riche en événements internes au Front de gauche. Pour n'en citer que quelques-uns : le PCF a choisi ses têtes de file aux européennes et le PG a tenu son Conseil National ce weekend.
Ces deux événements sont liés. Le PG a adopté un texte central, une résolution sur les élections européennes qui, si elle n'est pas parfaite (quel texte peut l'être ?) réaffirme quelque chose de trop souvent oublié du fait de l'emballement sur internet : le Front de Gauche est le cœur de notre démarche, le PCF est l'allié privilégié du PG et inversement. Bien entendu, affirmer cela ne veut pas dire oublier ses désaccords. Les différences de stratégie à adopter aux municipales nous ralentissent, comme nous le répétions, pour lancer les élections européennes.
De cette résolution, presque rien n'est retenu, si ce n'est la demande formulée d'un engagement clair à l'autonomie pour les échéances électorales de 2015. Pire que cela, tous les médias reprennent en boucle le titre « Le PG prêt à partir seul aux européennes ». Je vous laisse imaginer (mais vous les avez probablement constaté vous-même) les réactions des personnes n'ayant ni lu l'article du JDD dans son intégralité et s'étant arrêté au titre volontairement
tronqué et polémique ni lu la résolution votée par le CN du PG dans son
intégralité.
Bien entendu, certains ne veulent pas voir les avancées obtenues cette semaine. Quel que soit leur parti d'ailleurs... La séquence écoulée depuis le mois d'août dernier a laissé des traces, et continuera encore d'en laisser durant des années. L'analyse que nous faisions se vérifie : à force d'attiser des tensions qui n'avaient plus rien de politique, les réseaux sociaux alimentent une détestation intra-Front de Gauche destructrice. Je le disais plus haut, ceci ne reflète pas la réalité de notre société. Cela ne reflète pas non plus la réalité militante du Front de Gauche. Quels que soient les choix pris par telle section du PCF ou tel comité du PG, nous mènerons la bataille des européennes ensemble, unis contre l'austérité et pour rompre avec l'Europe libérale. Il suffit de se rendre sur le terrain pour voir qu'en ayant un objectif commun, tous les obstacles se surmontent facilement. Faire de la politique au sens noble du terme nous permet de dépasser ce qui nous sépare pour nous concentrer sur l'essentiel : l'union du Front de Gauche, préalable à une démarche bien plus large.
Cette résolution du PG sur les élections européennes, que dit-elle ? Elle dit tout simplement que le PG prend acte des divergences stratégiques au sein du Front de Gauche pour les municipales, mais qu'il convient de les dépasser. C'est à dire regarder plus loin, et dès aujourd'hui. Regarder ce «
coup d'après » des européennes, en s'engageant dans la bataille dès maintenant. L'attachement au Front de Gauche y est réaffirmé, sa volonté de s'élargir dans un grand front anti-austérité également. C'est le sens profond de cette résolution. Toute volonté de s'attacher à autre chose n'est là que pour diviser et entretenir des feux qu'il convient maintenant d'éteindre. Quand d'aucuns y voient une volonté solitaire, nous voyons
une stratégie profondément unitaire. Unitaire car répondant à plusieurs mois de flou à ce niveau, le paroxysme étant la mise en retrait du PGE. Unitaire car prenant le même chemin que le PCF qui réclame depuis des mois (novembre 2013) d'avancer sur cette question de l'élection du 25 mai dans le cadre du Front de Gauche. Unitaire enfin car passant outre les désaccords qui peuvent survenir ici et là, en s'appuyant plutôt sur les 50 % de villes où le Front de Gauche dans sa totalité a choisi l'autonomie vis à vis du PS –
ce qui est un fait historique ! Rendez-vous compte de la séquence camarades. Le PG a ses têtes de file. Le PCF a ses têtes de file. Ensemble va les désigner bientôt. Et nous voudrions faire croire que rien n'avance à ce sujet ? Cette résolution est profondément combative et unitaire, elle permet d'engager la marche en avant. D'autant plus que nous avons un programme, tout au moins dans ses grandes lignes : la rupture avec l'UE actuelle, libérale, la désobéissance aux traités austéritaires et la souveraineté populaire.
Ce matin (j'écris ces lignes en ce lundi 17 février), Pierre Laurent s'est exprimé dans les médias. Il a répondu aux interrogations exprimées dans le weekend par le PG. Sur l'utilisation du logo front de Gauche, il déclare que «
l'appellation, la signature PCF-membre du Front de Gauche est utilisée dans le matériel de campagne [à Paris], peut-être qu'elle peut ne pas être utilisée sur le matériel officiel si cela permet de calmer les choses ». Il y a une volonté d'apaisement sur cette question de part et d'autre, nous pouvons enfin espérer pouvoir nous concentrer sur l'essentiel. Le dirigeant communiste a également déclaré que «
des listes Front de Gauche aux européennes ? Pour [lui], ça fait des mois que ça va de soi ». J'ose espérer sincèrement que personne n'en doutait. Encore une fois, c'est une demande constante des communistes depuis des mois ! Mais cela va toujours mieux en le disant, et même en le répétant, surtout au moment où cette interrogation devient centrale. Dans le grand jeu médiatique qui pousse à passer sous silence les faits importants pour ne retenir que les petites phrases, ce début de semaine aura eu le mérite d'être celui de la clarté au sein du Front de Gauche, et cela fait du bien.
Maintenant, soyons pragmatiques. Dans les paroles et dans les déclarations, les européennes du Front de Gauche sont lancées. Plus précisément, elle sont prêtes à être lancées dès le 31 mars. En effet, et quelle que soit la stratégie adoptée localement, tous les militants sont sur la brèche pour les municipales. Les emplois du temps sont pleins, obligeant à jongler entre vie de famille, vie professionnelle et vie militante. Il sera extrêmement compliqué de doubler son temps militant pour les européennes. Une journée ne fait malheureusement que 24 heures ! Les représentants des partis du Front de Gauche auront, quant à eux, un boulevard médiatique, pensons-y. C'est surtout pour eux que la clarification est bénéfique. Elle permet de commencer à habituer les esprits à entendre parler des élections européennes, des listes Front de Gauche. Le travail militant pour ces élections n'en sera donc que facilité début avril ! Nous aurons besoin de cette aide précieuse : 5 semaines de campagne, c'est court. Très court. Mais nous ne pouvons, matériellement, pas faire autrement. Qu'il serait avantageux de pouvoir distordre le temps !
Camarades, il faut prendre le temps d'expliquer cette semaine écoulée : elle est centrale. Dans les mots (la résolution) comme dans les faits (la désignation des têtes de file). Expliquons partout et à tout le monde, dans nos partis respectifs comme chez nos partenaires, que nous avançons et que nous sommes prêts à mener le combat européen en ordre, rangés sous la même bannière. L'Europe sociale et la 6
ème République ne se construiront pas en attisant les rancœurs !
Alexandre Emorine