« Confortés par des partis qui reprennent des propos et des pratiques de l'extrême-droite, les groupes fascistes refont surface. » C'est le constat fait par les organisations qui appellent à une manifestation le 23 juin pour combattre le fascisme.
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Pour le grand public, la mort tragique de Clément Méric, des coups reçus par un sympathisant des Jeunesses nationalistes révolutionnaires et de 3e Voie, a braqué les projecteurs sur l'existence et les pratiques de ces groupes.
Ce n'est pas d'aujourd'hui qu'ils retrouvent de la vigueur.
En sommeil ou abrités au sein du Front national, ils ont bien profité du « débat sur l'identité nationale » à l'époque de la présidence Sarkozy pour surfer sur le rejet de l'autre, de l'étranger, de l'immigré en s'en prenant particulièrement aux musulmans.
A différentes périodes, les leaders de la droite, de l'UMP n'ont pas craint de reprendre à leur compte la rhétorique de l'extrême droite. On se souvient de J. Chirac partant en guerre contre
« le bruit et l'odeur » qui indisposaient et rendaient fou les braves familles françaises. Ou encore le discours anti-Roms de Sarkozy à Grenoble la dernière année de sa présidence. Et plus récemment, le
« pain au chocolat » de Coppé qui, à son tour, discriminait les musulmans. On pourrait allonger la liste avec des déclarations de diverses personnalités de l'UMP.
La situation de crise économique qui perdure depuis 2008 avec ses dramatiques conséquences sociales - chômage, précarité et pauvreté, inégalité - offre à ces groupes néo-fascistes un terreau pour développer leur idéologie nauséabonde, raciste, xénophobe et homophobe.
Les prises de position du Parti socialiste au pouvoir qui poursuit la politique d'austérité démobilisent et démoralisent alors que dans le même temps le Front national, s'agissant du rapport de Yannick Moreau, ne craint d'affirmer que celui-ci est
« la boîte à outils du Medef » et
« bruxello-compatible ». On nage en pleine inversion en terme d'expression et de choix politique.
La porosité qui s'est installée entre l'UMP et le Front national au niveau des idées a englobé ces petits groupes dont certains ont d'ailleurs joué les petites mains du Front national à diverses occasions. Les sondages, qui indiquent qu'une part croissante des militants ou sympathisants de l'UMP sont partisans d'alliance électorale avec le Front national, en sont un des symptômes.
Mais c'est la campagne contre le projet de loi en faveur de l'ouverture du mariage pour les couples homosexuels qui a permis à ces groupes nationalistes d'agir au grand jour avec le label du mouvement initié et porté, entre autres, par Frigide Barjot.
Les prises de position hostiles de la quasi-totalité du personnel politique, à l'UMP et à l'UDI, leur jusqu'au-boutisme dans les manifestations, auxquelles ils ont participé dans une grande proximité avec la délégation du Front national ont ouvert un boulevard à ces groupes extrémistes.
Au grand jour, ils ont agi, mis en place de nouveaux réseaux d'activistes comme le « Printemps français », décalque réactionnaire des printemps arabes.
La droite décomplexée voulue par Sarkozy s'est complétement lâchée sur cette question de société. Elle a fait cause commune avec les couches les plus conservatrices, rétrogrades dans une conception figée des rapports sociaux. Sur le terrain, elle a rencontré la hiérarchie catholique et ces groupes nationalistes. La porte s'est ouverte à l'homophobie, aux actes homophobes.
Les accusations irresponsables à l'égard de Christiane Taubira, ministre de la Justice, les propos insensées de Frigide Barjot accusant le gouvernement de vouloir du sang ont libéré la parole et les actes de ces groupes.
En mal de stratégie pour reconquérir un pouvoir dont elle s'estime injustement privée, la droite, donne l'impression de vouloir employer tous les moyens pour hâter la date de son retour au pouvoir.
Combattre le danger que représentent ces groupes fascistes implique non seulement de mettre sur pied un mouvement unitaire pour refuser l'intolérance, la haine et l'exclusion, mais aussi de lutter pour faire triompher une politique alternative à l'austérité et prenant à bras le corps la question de l'emploi pour tous, des inégalités, des services publics, d'un autre partage des richesses.
Michel Gautier