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 Climat : Mediapart dresse la liste des dix plus gros pollueurs en France

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MessageSujet: Climat : Mediapart dresse la liste des dix plus gros pollueurs en France   Climat : Mediapart dresse la liste des dix plus gros pollueurs en France EmptySam 18 Jan - 23:57

ArcelorMittal, EDF, Total, E-ON et GDF Suez sont, de loin, les industriels les plus émetteurs de CO2 en France. Alors que se profile la loi sur la transition énergétique, Mediapart a établi le palmarès des plus gros pollueurs climatiques. Surprise : EDF, pourtant producteur à 80 % d’électricité d’origine nucléaire, y occupe la deuxième place.

E
n France, l’émetteur de gaz à effet de serre, c’est un peu l’homme invisible : beaucoup en parlent, mais personne ne sait vraiment de qui il s’agit. L'économie française est l'une des moins carbonées d'Europe. Rapportées au PIB, les émissions représentent moins des deux tiers de l'Union européenne ou de l'Allemagne. Cette singularité suffit souvent à éteindre les curiosités. La politique climatique, en partie décidée à Bruxelles, est mal connue, peu lisible, et mal mise en œuvre, conclut un rapport très critique de la Cour des comptes publié le 16 janvier dernier (voir ici).

Dans les nomenclatures officielles, les rejets de gaz à effet de serre sont mesurés par secteurs : les transports (27 % du total en 2011), l’agriculture (19 %), les logements et les bureaux (16 %), les industries, les déchets. Les responsabilités individuelles sont diluées dans la masse globale des tonnes d’équivalent CO2.

Climat : Mediapart dresse la liste des dix plus gros pollueurs en France AEE
Source : Agence européenne de l'environnement, juin 2013.

L’appareil productif est systématiquement jaugé par tranche de spécialisation : énergies (12 %), industries manufacturières et construction (13,5 %), procédés industriels (8 %). Avec 33 % du total, l’industrie est bien la première source de gaz à effet de serre en France. Et donc le premier contributeur au dérèglement climatique.

Mais qui sont exactement ces entreprises ? Et quels efforts s’apprêtent-elles à accomplir ? Les réponses sont toujours floues. Réduire nos émissions est pourtant un objectif récurrent de nos politiques publiques. Le projet de loi sur la transition énergétique, attendu au mieux fin 2014, devrait comprendre un objectif de division par quatre des émissions de gaz à effet de serre à l’horizon 2050, l’instauration de « budgets carbone » pour en piloter la décrue et prévoir la baisse de 50 % de la consommation de combustibles fossiles en 2030. À l’échelle européenne, le paquet énergie-climat 2030 en cours d’élaboration (voir ici) pourrait exiger des États membres une baisse de 45 % des émissions de gaz à effet de serre pour 2030.

Prenons l’exemple du CO2, gaz à effet de serre le plus répandu – mille ans après son émission, il en reste encore 20 % dans l’atmosphère. Il existe plusieurs registres de déclaration d’émissions de dioxyde de carbone. Ils sont tous publics, et librement consultables sur internet (ici, , et encore ici). Depuis la création du marché européen des quotas de carbone, les sites industriels les plus polluants doivent en effet déclarer chaque année le total de leurs rejets de CO2 – un millier d’installations sont concernées : centrales thermiques, chaufferies urbaines, usines sidérurgiques, métallurgiques, pétrochimiques, cimenteries, papeteries…

Mais ces millions de tonnes de gaz carbonique sont comptabilisées usine par usine, centrale par centrale, et non par entreprise. Impossible en l’état de savoir quelle société en dégage plus que les autres.

Mediapart s’est plongé dans ces tableaux et a calculé qui en émettait exactement et en quelle quantité en 2012, dernière année pour laquelle les données sont disponibles.

Voici les résultats de ce palmarès des plus gros pollueurs climatiques sur le territoire national : le groupe de métallurgie ArcelorMittal et l’énergéticien EDF arrivent loin devant les autres, avec respectivement 19 et 16,5 millions de tonnes de CO2, soit l’équivalent de 18 % et 16 % de l’ensemble, selon nos estimations. Ils sont suivis du pétrolier Total (9 % des émissions totales de CO2), de l’énergéticien allemand E.ON (5 %), du groupe GDF-Suez (4 %), du spécialiste des matériaux de construction Lafarge (4 %), du pétrolier ExxonMobil (4 %). Suivent ensuite le cimentier Italcementi, le producteur de chaux Lhoist et le cimentier Vicat.

Climat : Mediapart dresse la liste des dix plus gros pollueurs en France Top10_CORR
© Arthur Pivin.
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© © Arthur Pivin.

Première surprise de ce palmarès : la place d’EDF, deuxième plus gros émetteur de CO2, malgré la part ultra-dominante du nucléaire dans son offre d’électricité (80 %), et la moindre – mais non négligeable – de l’hydraulique. On comprend mieux en consultant une autre liste, celle des sites qui rejettent le plus de gaz carbonique : on y retrouve quatre centrales thermiques de l’électricien français : Cordemais (charbon et fioul), Blénod (charbon et gaz), Le Havre et La Maxe (charbon). Cumulées, elles représentent plus de la moitié des rejets du groupe.

« EDF, loin d'être aussi faiblement émettrice qu'elle le prétend »

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Centrale de Cordemais, la plus grosse centrale thermique à flammes d'EDF en France (©EDF).

D’ici à 2015, dix centrales au charbon doivent cesser leurs activités, et être remplacées par des tranches fonctionnant au gaz. C’est aussi le cas pour la centrale la plus polluante d’E.ON, Émile Huchet (Moselle), où est  expérimenté un système de stockage d’hydrogène. En 2012, la production d’électricité à base de charbon avait progressé de 35 % en France. Mais un vaste mouvement de fermeture de ces unités, plus chères que celles au gaz, est enclenchée, dans la foulée de la transposition de la directive relative aux émissions industrielles (IED) qui limite plus drastiquement les gaz à effet de serre.

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© Arthur Pivin.

EDF confirme nos chiffres – « Oui, on émet beaucoup parce qu'on produit beaucoup d'énergie » – mais rappelle qu’« en France, 95 % de notre électricité est décarbonée, avec 80 % de nucléaire et 15 % d’hydraulique ». Le parc électrique français reste dans son ensemble l’un des moins émetteurs en Europe avec annuellement 0,4 tonne de CO2 par habitant, contre 3,6 tonnes en Allemagne.

Les installations thermiques classiques constituent la troisième source de production d’électricité en France avec en moyenne 10 % de l’énergie électrique totale. À quoi servent-elles ? En partie, à alimenter les chauffages et autres appareils électriques dans les logements en fin de journée l’hiver : « l’effet de pointe ». Mais aussi à pallier la faible disponibilité des réacteurs atomiques, comme cela s’est produit pendant l’été 2012 : la production nucléaire avait chuté de 9,7 % par rapport à l’année précédente, et la consommation de charbon atteint un niveau très élevé pour la période.

Sur son site, Réseau de transport d’électricité (RTE), filiale d’EDF, publie en temps réel la quantité de CO2 dans les kilowattheures d’électricité produits en France.

L’électricien ne s’est fixé « aucun objectif en volume de réduction de ses émissions de CO2 », précise le groupe, mais doit fermer dix réacteurs de centrales à charbon d’ici 2015, ainsi que certaines tranches de fioul. « EDF est loin d'être aussi faiblement émettrice qu'elle le prétend puisque c'est le deuxième plus gros pollueur en France, analyse Célia Gautier, chargée de mission sur les politiques européennes pour le Réseau action climat (RAC). Le recours massif et typiquement français au chauffage électrique pour écouler la production nucléaire amène à rallumer en cas de grand froid les centrales thermiques comme celle de Cordemais (dont la fermeture n’est pas prévue - ndlr), pour répondre aux pics de consommation. L'importance des émissions issues des centrales thermiques montre aussi qu'en l'absence d'un prix significatif pour les émissions de CO2 les producteurs d'énergie ne sont pas incités à fermer leurs centrales charbon et à développer les sources d'énergie renouvelable. »

Climat : Mediapart dresse la liste des dix plus gros pollueurs en France AM_Dunkerque
Site d'ArcelorMittal à Dunkerque (© Arcelor Mittal)

Concernant ArcelorMittal, les sites de Dunkerque et de Fos-sur-Mer produisent de l’acier liquide, dont la fabrication requiert une consommation massive de charbon afin d’obtenir des températures très élevées. Ils rejettent chacun une quantité colossale de dioxyde de carbone, respectivement 11,2 et 7,1 millions de tonnes. Ils sont de très loin les sites les plus émetteurs du pays. À la différence d’EDF, le groupe sidérurgique affiche un objectif officiel de baisse de 8 % de ses gaz à effets de serre entre 2007 et 2020. L’arrêt du seul site de Florange en 2012 (2,5 millions de tonnes de CO2 en 2011) remplit à lui seul cet engagement, ce qui en dit long sur sa timidité.

« ArcelorMittal est l'entreprise la plus émettrice en France, mais c'est aussi celle qui reçoit le plus de quotas de CO2 à titre gratuit, quand d'autres entreprises doivent les acheter aux enchères, explique Célia Gautier, du RAC. Uniquement pour les hauts-fourneaux de Florange, qui ont fermé depuis mars 2013, le gouvernement avait prévu d'allouer à titre gratuit 3,8 millions de quotas de CO2 par an à ce site industriel, y compris en 2013 et jusqu'en 2020 ! Cela représente un cadeau d'une vingtaine de millions d'euros au cours actuel de la tonne de CO2. »

Mais « c'est un peu trompeur pour Lafarge et surtout Total, car ces chiffres sur la France ne sont pas du tout représentatifs de leurs responsabilités d'émetteur, Total émettant bien plus via ses activités en dehors du territoire », analyse Anne Valette, chargée de campagne climat à Greenpeace France. Sur le monde entier, en 2010, Total a rejeté 398 millions de tonnes de CO2, en tenant compte des rejets liés à la combustion des barils extraits, selon les calculs du spécialiste du climat Richard Heede publiés dans la revue scientifique Climatic change fin 2013 (à lire en cliquant ici). Le bilan du cimentier Lafarge atteint alors 61 millions de tonnes. C’est largement au-dessus des données nationales.

L’industrie représente 21 % de la consommation finale d’énergie en France, un poste en constante baisse depuis quarante ans, sous l’effet de la fermeture des usines, de l’amélioration de l’efficacité énergétique des équipements et du remplacement partiel des fossiles par l’électricité. À cause des délocalisations, une partie de la production nécessaire à la satisfaction de la demande intérieure se réalise hors de nos frontières. Pour mieux prendre en compte notre empreinte carbone réelle, les statisticiens intègrent désormais à leurs calculs le bilan carbone de cette offre hors de nos frontières. Résultat : une forte réévaluation de nos émissions, qui passent de 8,2 tonnes de CO2 par habitant à 12,2 tonnes (en 2007) (voir sur ce document, p. 24).

Des millions d'euros de cadeaux en CO2

Deuxième surprise de ce classement : la liste des plus gros émetteurs de CO2 ressemble beaucoup à celle des entreprises qui ont gagné le plus d’argent grâce à ce même carbone sur le marché européen des quotas. Créé en 2005, le système EU-ETS impose un seuil maximal d’émission aux industries les plus polluantes. Mais ces allocations furent très généreuses et, avec la crise économique, le gaz carbonique rejeté par leurs usines a eu tendance à se réduire. Si bien que l’écart entre les rejets autorisés par l’Europe et ceux effectivement réalisés (en France) dépasse en 2012 le million de tonnes pour sept groupes industriels, parmi lesquels : ArcelorMittal, Total, GDF Suez, E.ON, EDF et Lafarge.

Pour ces multinationales, cette différence est lucrative : malgré le faible cours du carbone sur le marché européen, l’enveloppe des sur-allocations a représenté un cadeau de 3,9 milliards de dollars entre 2008 et 2011, sur l’ensemble de l’Europe, selon les calculs de l’ONG britannique Sandbag. Tout ce capital n’a pas été vendu. Les recettes concrètement retirées de la vente d’une partie de ces excédents atteignent 1,8 milliard d’euros sur la période, selon Sandbag. ArcelorMittal aurait ainsi vendu pour 250 millions d’euros de quotas en Europe sur quatre ans. La seule année 2012 fut encore plus profitable, avec 220 millions de recettes, comme l'indique le rapport financier du groupe.

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© Arthur Pivin.
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© Arthur Pivin.

Pour la France, en 2012, le groupe ArcelorMittal a reçu un « cadeau » de 5,3 millions de tonnes de CO2, pour une valeur comprise entre 32 et 50 millions d’euros (en fonction du cours du marché cette année-là), selon nos estimations. « Comme l'autorise la réglementation, une partie des quotas dont le groupe dispose a été vendue et les fonds générés ont été utilisés pour financer des projets d'amélioration d'efficacité de nos usines ayant un impact sur l'efficacité énergétique et une réduction des émissions de CO2 », explique le groupe, sans chiffrer les recettes de ses ventes.

« Le gouvernement du Luxembourg a posé un ultimatum au géant de l'acier pour qu'il restitue à l'État ses quotas inutilisés, indique Célia Gautier du RAC. Le gouvernement français devrait faire de même. »

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Raffinerie de Normandie de Total, au Havre (©Total).

Autre bénéficiaire, Total, qui a fini l’année avec 3,6 millions de tonnes de CO2 d’excédent, pour une valeur comprise entre 22 et 34 millions d’euros. Le groupe assure en avoir conservé la totalité. De son côté, GDF-Suez possédait à peu près la même réserve de dioxyde de carbone fin 2012. Quant à EDF, il a profité d’un surplus de 1,6 million de tonnes en 2012, soit un capital compris entre 9,5 et 15,1 millions d’euros, que le groupe assure aussi avoir conservé : « Nous avons une gestion prudentielle et non spéculative de cette question. »

Le cimentier Lafarge, 6e plus gros émetteur en France en 2012, a retiré 562 millions d’euros de la vente de ses quotas non utilisés en Europe entre 2008 et 2011, selon Sandbag. Dans le même secteur, Italcementi, 8e plus gros pollueur du climat en France en 2012, en aurait obtenu 135 millions d’euros sur la même période.

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Les douze sites les plus suralloués en 2012 (©Arthur Pivin).

Pour Maxime Combes, économiste et membre d’Attac, « l’Union européenne vient de perdre deux ans à vouloir réformer le marché du CO2 pour, au bout du compte, ne le modifier qu’à la marge. Il est une entrave à toute nouvelle politique de transition énergétique ». Au côté d’une centaine d’organisations, Attac France réclame l’abolition du système EU ETS, et son remplacement par des politiques fiscales adaptées et la fin des subventions aux énergies fossiles (voir aussi ici). Pour Célia Gautier du RAC : « Les plus gros pollueurs français et européens bénéficient d'un traitement de faveur injustifié. Aujourd'hui, le marché carbone européen est utilisé non pas pour enclencher les investissements dans la transition énergétique, car le prix du CO2 y est trop faible, mais pour subventionner les industriels les plus pollueurs. »

90 entreprises ont émis les deux tiers des émissions mondiales

Près des deux tiers des émissions de CO2 et de méthane dans le monde depuis le milieu du XIXe siècle proviennent de 90 entreprises : Chevron, ExxonMobil, Saudi Aramco, BP, Gazprom, Shell occupent les premières places de ce palmarès des plus gros pollueurs historiques du climat. Le premier français, le pétrolier Total, arrive en 13e position – mais se hisse au 7e rang de la liste des entreprises privées – avec 12 milliards de tonnes de dioxyde de carbone rejetées depuis 1854.

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© The Guardian.

Le spécialiste du climat Richard Heede, ancien du Rocky Mountain institute d’Amory Lovins, a publié les résultats de ce spectaculaire calcul dans la revue scientifique Climatic change en octobre dernier (voir ici la superbe visualisation qu'en a livrée le quotidien britannique The Guardian).

Les industriels qui ont le plus largué de gaz carbonique dans l’atmosphère sont pétroliers, gaziers, producteurs de charbon et fabricants de ciment. La moitié du CO2 et du méthane crachés par les industriels depuis 1751 l’a été au cours des trente dernières années. L’effet sur le dérèglement du climat est catastrophique : on trouve encore dans l’atmosphère 20 % des émissions de CO2 mille ans après. Nul ne peut plus exclure que l’effet de serre soit irréversible. La teneur de l’atmosphère en gaz à effet de serre a atteint un niveau inégalé en 2012, selon l’organisation météorologie mondiale (voir ici). Les causes du dérèglement du climat ne cessent de s’aggraver.

Pour la première fois, une autre équipe de chercheurs a mesuré la contribution des pays au dérèglement climatique, dans un article publié par Environmental research letters (à lire ici). Ils ne se contentent pas de mesurer leurs émissions de gaz à effet de serre (CO2, méthane, protoxyde d’azote, aérosols de sulfate), mais calculent aussi l’impact que ces rejets gazeux ont eu sur le réchauffement planétaire depuis la révolution industrielle (et jusqu’en 2005). Le résultat donne un classement inattendu. Premier responsables historique du dérèglement climatique : les Etats-Unis, suivis de la Chine, la Russie, le Brésil, l’Inde, l’Allemagne, le Royaume-Uni, la France (en 8e position donc), l’Indonésie et le Canada (voir plus sur cet article).

Quelles conclusions tirer de ce palmarès ? Nos émissions de CO2 ne sont pas seulement la conséquence de nos modes de vie et de nos choix de sociétés. Elles concernent directement des acteurs économiques majeurs, qui s’en arrangent et en tirent parfois profit dans la plus grande discrétion. Face au défi sans précédent du dérèglement climatique, comment se répartit l’effort entre ménages et entreprises ? Est-il justement partagé ? Personne n’en discute. L’arrêt des émissions de gaz à effet de serre ne peut commander à lui seul la fermeture de sites industriels qui emploient des travailleurs qui en tirent leurs moyens de subsistance, et qui sont aussi les consommateurs des produits qui en sortent. En matière d’émission de CO2, la dichotomie entre offre et demande n’est pas si simple.

Climat : Mediapart dresse la liste des dix plus gros pollueurs en France Inde
Pollution atmosphérique en Inde (Arko Datta/Reuters).

Et pourtant, l’échec de la diplomatie du climat à endiguer les gaz à effet de serre appelle à trouver des alternatives à la logique du protocole de Kyoto, qui fait peser sur les seuls États la responsabilité de la décrue des émissions. Les pistes le plus souvent discutées passent par des taxes aux frontières, l'écotaxe kilométrique, l'arrêt des subventions des énergies fossiles.

Dans ces conditions, identifier les plus gros pollueurs industriels ne se résume pas à un concours de virtuosité mathématique. Cela met en lumière des acteurs majeurs du sujet, jusqu’ici sous-exposés politiquement. Aux États-Unis, c’est de plus en plus un enjeu juridique. Les contentieux devant la justice et les class actions ont exercé une pression considérable sur les fabricants de tabac. Des poursuites sont désormais envisagées contre les sociétés qui ont continué à massivement rejeter du dioxyde de carbone dans l’atmosphère en connaissant parfaitement son impact sur la crise climatique.

Comment avons-nous travaillé ?

Plusieurs registres des émissions de CO2 existent en France. Ils diffèrent par leurs objectifs et leur champ d'application. D'abord, à l'issue de la convention d'Aarhus de 1998 et du protocole de Kiev de 2003, l'Union européenne a demandé à ses États-membres de former des bases de données regroupant les émissions polluantes issues de certaines branches de l'industrie. L'Europe voulait poser les bases de la lutte contre les émissions de gaz à effet de serre, et cela devait logiquement commencer par un inventaire.
Les installations concernées envoient une déclaration des impacts divers de leurs activités en termes d'émissions polluantes (pas seulement le CO2) sur le site GEREP, administré par le ministère de l'écologie. Celles-ci sont vérifiées par un organisme indépendant, puis stockées dans une base de données, la BDREP (Base de données du registre des émissions polluantes), gérée par l'INERIS. À partir de cette base mère, non destinée au public, sont formés plusieurs registres consultables sur internet, et notamment le registre de l'IREP et le registre E-PRTR. http://prtr.ec.europa.eu

Par ailleurs, depuis 2005, l’Europe a instauré un marché du carbone, qui se voulait le pilier de sa politique climatique. On peut résumer brutalement cette politique complexe comme suit : au début de l'année, chaque site industriel se voit attribuer gratuitement des « permis de polluer », en quantité plus ou moins abondante selon son activité. Les entreprises peuvent se les racheter entre elles, à un prix qui dépendra de la physionomie du marché. Fin décembre, chaque site doit être en possession d'une quantité de quotas au moins égale à la somme de ses émissions de CO2 sur l'année, sous peine de payer une forte amende.
 L'objectif de cette politique était d'inciter les gros pollueurs à réduire leurs émissions en donnant un prix au CO2. Ce processus laisse chaque année un registre listant les émissions carbonées des sites concernés. On peut également y trouver les chiffres des allocations gratuites de quotas. En France, environ 1000 installations sont concernées, et les données sont consultables sur le site de l'EU TL.

Nous avons analysé les bases de l'IREP et celles de l'EU TL. C'est finalement le classement issu de la seconde qui a été retenu, pour deux principales raisons. D'abord, elle proposait des données datant de 2012, contre 2011 pour l'IREP. De surcroît, si les deux registres concordaient dans la majorité des cas, quelques données nous avaient paru surprenantes dans celles gérées par l'INERIS. En particulier, un site de traitement de déchet du groupe IDEX, qui emploie environ 25 personnes à Taden dans les Côtes-d’Armor, y figurait en tant que vaillant vice-champion des émissions de CO2 en France, avec plus de 7 millions de tonnes par an, un tiers de plus que la plus grande centrale à charbon hexagonale. (Nous avons pu les contacter récemment, et en effet il y avait une erreur. Leur déclaration se voulait en kg, et le chiffre réel est donc 1000 fois inférieur.)

Comme la déclaration est faite site par site, la principale difficulté a été de rattacher les différentes installations aux entreprises qui les exploitent. Souvent, le nom du groupe concerné n’apparaissait pas dans la ligne en question du registre. Il fallait alors regarder la situation géographique de l'usine et son secteur d'activité pour parvenir à faire le lien avec l'entreprise mère.
Concernant les groupes qui possèdent différentes filiales, nous avons décidé de ne pas faire de distinction et d'attribuer l'ensemble des émissions à la maison mère (sauf pour EDF, à qui nous n’avons pas attribué les émissions de Dalkia, en raison du rachat en cours, cela ne change rien au classement général). Dans la même logique, nous n'avons pas compté les entreprises dont l'ensemble du capital était réparti entre plusieurs grands groupes. Leurs émissions ont été attribuées à leurs actionnaires, dans la mesure de leurs parts respectives. Par exemple, l'entreprise Naphtachimie, détenue à part égales par Total et INEOS, possède un site pétrochimique en Provence très fortement émetteur. Ses rejets de CO2 ont été répartis entre ces deux mêmes groupes, probablement avec la même équité que le sont ses bénéfices.

La base de données EU TL fournit également les données d'allocations gratuites de quotas. Cela permet d'avoir une idée de la générosité de l'Union européenne vis-à-vis de certains groupes.
Les dix entreprises affichant les plus gros excédents de quotas captent à elles seules plus de 66 % l’excédent d'allocations attribué à l'ensemble des installations françaises concernées. L’ONG britannique Sandbag, pionnière de l’effeuillage des données européennes du marché du carbone, a publié à ce sujet de nombreux rapports. Les différents rapports du collectif Sandbag sont consultables sur son site.

Boîte noire

Cet article est le fruit d'un travail de collecte et d'analyse de données de plusieurs semaines.
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