A Paris, des milliers de manifestants contre l'austérité et pour une « alternative à gauche »
« Passerelles »« C'est un front du peuple qui se constitue » assure Jean-Luc Mélenchon. Derrière la banderole, les nombreuses personnalités du Front de gauche côtoient les anciens candidats du NPA à la présidentielle, Olivier Besancenot et Philippe Poutou ; des syndicalistes (Annick Coupé, porte-parole de Solidaires) ; mais aussi des élus socialistes ou écologistes.
Place de la République, samedi 12 avril © Mathieu Magnaudeix
Parmi eux, Liêm Hoang Ngoc, eurodéputé socialiste sortant et membre du bureau national du PS, qui a récemment invité François Hollande à
« rompre avec TINA ».
« La France s'apprête à appliquer des politiques d'austérité qui ont échoué partout ailleurs », avertit le parlementaire, écarté des listes PS pour les européennes. Il
réclame un
« congrès extraordinaire pour clarifier la ligne politique » du PS.
« Hollande s'est trompé de premier ministre et nous impose un virage qui n'a pas été discuté, il y a un grand trouble dans l'aile gauche du PS », assure-t-il.
« Cette manifestation n'est pas une lame de fond, mais une démonstration de force, analyse le syndicaliste
Pierre Khalfa, coprésident de la Fondation Copernic et membre du conseil scientifique d'Attac
. L'important, c'était déjà de la faire, pour ne pas laisser la rue à la droite et montrer qu'il y a une opposition de gauche à la politique menée. La claque des municipales est en train de faire bouger les lignes dans la majorité. Et cela va s'amplifier après les européennes, qui vont voir les listes de la gauche de transformation sociale progresser. »De fait, plusieurs organisations présentes samedi se sont divisées sur l'opportunité de manifester. Des fédérations et des unions départementales de la CGT défilent avec camions et drapeaux. L'ancien secrétaire général, Bernard Thibault,
était d'ailleurs dans le cortège samedi. Mais pas l'actuel dirigeant, Thierry Le Paon, ce qui lui a valu un
houleux débat interne. Des syndicalistes de la FSU sont venus, mais la direction du syndicat enseignant est restée chez elle.
On trouve également quelques drapeaux verts. EELV, qui ne participe plus au gouvernement mais reste dans la majorité, n'a pas appelé à défiler, mais plusieurs élus ou responsables écologistes sont là. Par exemple Caroline Mecary, conseillère régionale EELV en Île-de-France, le maire du II
e arrondissement de Paris Jacques Boutault (juste réélu), l'ancienne porte-parole du parti, Élise Lowy. Annie Lahmer, cosecrétaire régionale d'EELV Île-de-France, déplore que les écologistes
« ne soient pas beaucoup plus nombreux à être venus manifester ». Elle assure que, malgré la fin de non-recevoir d'EELV au Parti de gauche,
« des passerelles sont en train de se créer » sur le terrain entre les deux formations.
République, samedi 12 avril © Mathieu Magnaudeix
Parmi les manifestants,
la volonté est au rassemblement.
« Nous connaissons les solutions pour en finir avec l'austérité, mais jusqu'ici nous avons échoué à les rendre visibles, explique Khalfa.
Nous devons mettre désormais ces alternatives dans le débat public. Cela va de pair avec un regroupement politique de la gauche antilibérale. » « L'austérité conduit à l'échec et au chômage de masse, assure la députée communiste Marie-George Buffet.
Est-ce qu'on reste sans rien faire, dans le désespoir et l'abstention, ou est-ce qu'on recrée de l'alternative à gauche ? Tous ceux qui veulent faire la campagne des européennes avec nous sont bienvenus. Nous pouvons par exemple travailler avec les écologistes qui n'ont pas voté la confiance. » « Quel bonheur de manifester avec le NPA ou avec le maire écologiste du IIe arrondissement de Paris », se réjouit Raquel Garrido. La responsable du PG ne ferme pas la porte à quelques candidatures NPA sur les listes Front de gauche aux européennes, officiellement bouclées. Elle explique aussi que des représentants de l'aile gauche d'EELV devraient rencontrer bientôt les responsables du PG.
« Ce genre d'entretien bilatéral ne s'était pas produit depuis des années. » Le PG aimerait discuter avec EELV d'alliances éventuelles l'an prochain aux régionales. Une option que les dirigeants écologistes n'envisagent pas, même si certains militants plaident en ce sens.
Correction: comme me l'ont signalé deux lecteurs sur Twitter, Bernard Thibault, ancien secrétaire général de la CGT,
a bien manifesté samedi. Je ne l'avais pas vu dans le cortège.
Bernard Thibault et Jean Le Garrec !
Mathieu Magnaudeix, pour Médiapart