Serge Dassault ne verra donc pas son immunité de sénateur levée. Ainsi se sont prononcés
13 sénateurs sur les 25 votants que comptaient le bureau du Sénat qui avaient à se prononcer le mercredi 8 janvier 2014. Nous le savons maintenant, la droite UMP a fait bloc pour protéger l’un des siens, fortunés qui plus est. Quoi de plus normal, quoi de moins étonnant pour une droite française particulièrement affairiste, amoureuse de mallettes baladeuses, de truquages de listes électorales et même de réanimation de morts électoraux. Ce qui frappe surtout réside dans un vote majoritaire contre la levée de l’immunité de Dassault alors que la droite était minoritaire lors du vote. Nous ne nous laisserons pas attirés par une sordide comptabilité qui consisterait à affirmer que le problème c’est seulement la droite car seuls 2 sénateurs PS ont donné un blanc seing à l’ami douteux Serge.
Cette arithmétique, effectuée ça et là par quelques députés PS et visiblement peu partégée, nous laisse en vérité sans voix. Nous préférons nettement les commentaires des militants socialistes qui, comme tous les militants d’une république impartiale et transparente, crient à la honte. Car la cause de cette incroyable camouflet infligé à la démocratie française n’est pas à rechercher dans une lugubre addition qui accablerait certains plus que d’autres, qui dédouanerait d’autres plus que certains. La cause est d’abord et avant tout politique. Cette cause a pour nom la V
ème République.
Durant des semaines, Serge Dassault a fait du lobbying sur ses collègues sénateurs. Il a cherché à gagner la confiance de ses paires, l’indulgence de ses alter-égos, l’approbation de ses « semblables ». C’est exactement ce qu’il fait dans
le courrier qu’il envoie aux membres de la commission.
Et le réflexe d’appartenance à une même caste s’est donc finalement exercé chez 13 sénateurs plutôt que le réflexe de la justice indépendante et libre de ses mouvements. Car dans la V
ème République, un élu est un notable privilégié, un notable qui peut donc faire appel à des privilèges, l’un d’entre eux étant l’immunité. Intouchables, inattaquables, ainsi sont-ils, à moins que la faute soit colossale comme dans l’affaire Cahuzac. Le parallèle avec l’ancien régime est tellement évident qu’on vous laisse tirer la ficelle « des privilèges » octroyés à l’élu par la V
ème République vous même.
Dans une république mature et adulte, l’élu doit être un citoyen à l’égal des autres. La justice devrait donc pouvoir faire son travail sans avoir à demander la permission à qui que ce soit. Elle ne demande pas la permission à un collège de citoyens notables lorsqu’elle souhaite enquêter sur Monsieur ou Madame tout le monde. De même, dans une république mature et adulte les citoyens doivent pouvoir, en direct, révoquer un élu, un ministre, un président même, dès lors qu’une infraction le justifiant a été commise. Pour mémoire, Cahuzac pouvait rester député s’il l’avait décidé ainsi.
On voit déjà poindre la critique d’un peuple « immature », « inculte » que ne saurait donc pas prendre ce type de décision importante. Comme nous voyons la mise en garde contre le populisme alors que nous souhaitons l’avènement d’une 6e République populaire. Il est tellement vrai que les 13 sénateurs du 8 janvier 2014, dont 2 de « gauche », ont fait preuve de culture et de maturité politique et rendent les élus un peu plus populaires.
Sans aucun doute, la véritable opposition intellectuelle à la fin du principe d’immunité de l’élu ou encore de la révocation de ce dernier par le peuple vient d’un insupportable complexe de supériorité selon lequel l’élu lui sait ce qui est bon, le citoyen non. Ainsi, ne pas respecter ses promesses électorales, faire l’inverse de ce que l’on a écrit noir sur blanc, frauder le fisc, faire l’anguille avec la justice, tout cela n’y serait pour rien…Il y aurait uniquement les éclairés du bon côté, les obscurs incultes de l’autre.
A gauche pour de vrai nous sommes prêts à parier que les citoyens auraient voté à une très large majorité la levée de l’immunité de Serge Dassault comme ils auraient révoqué Cahuzac sans que l’on ait besoin de le supplier de ne pas faire un retour fatal!
A gauche pour de vrai, nous faisons le pari d’un peuple responsable qui forcerait ses élus à la responsabilité! Car sans immunité et sous la sanction d’une révocation possible, les élus indélicats réfléchiraient à deux fois avant d’eclabousser l’ensemble des élus, l’ensemble des citoyens, l’ensemble de la République.
L’impact politique de ce maintien de l’immunité de Serge Dassault peut, qui plus est, s’avérer être dévastateur. Un antisémite se voit dans l’impossibilité de faire son show nasillard, et c’est mille fois tant mieux. Même si la justice, qui a déjà tranché sur le cas du nasillard, n’a jamais vu ses sentences exécutées, à l’image des 60 000 euros d’amende jamais payés par l’intéressé. Que
Valls, comme ses prédécesseurs auraient déjà du le faire avant lui, exige des auxiliaires de justice que sont les policiers d’aller récupérer l’argent que le nasillard doit à la république. Puis voir dans la foulée 13 « sages », 13 hauts élus, 13 sénateurs, dont 2 de « gauche », maintenir à Serge Dassault ses privilèges est une inconscience, ni plus, ni moins. Car les antisémites de tous poils ne verront pas en quoi la Ve République, à travers les privilèges qu’elle organise, est la vraie coupable. Le FN monte paraît-il ? Tout le monde crie à l’horreur et à l’unité de la république autour de ses valeurs de liberté, d’égalité et de fraternité? Hier, les institutions de la Ve République ont renforcé un peu plus le FN, insulté un peu plus sa devise fondatrice.
Dans l’affaire Serge Dassault il n’y a qu’un seul responsable ET coupable : la Vème République!Sydne93 
