La nouvelle est tombée. Et avec elle les masques. Plus possible de vous dissimuler derrière votre si fragile rhétorique usuelle au sein de la gauche du PS: » nous ne pouvons pas laisser le parti au mains des droitiers ». Car non seulement ils détiennent le Parti Socialiste, mais ils détiennent également les rennes du pouvoir. A moins d’accepter de leur servir de caution, votre seul choix possible désormais lorsque l’on défend le progrès social, la redistribution et la retraite par répartition est de s’opposer au PS qui peut à présent être rebaptisé le Parti Sarkozyste. Votre seul choix est donc de le quitter. Car jamais un gouvernement de gauche n’avait osé rallonger la durée du travail. Il s’agit là d’un axe de clivage majeur. Même Lionel Jospin se tenait du bon côté du mur. Car toujours la droite libérale a eu pour projet d’accroître le temps de travail, à la journée, à la semaine, au mois, à l’année, à vie!
Inutile de revenir sur toutes les mesures prises par le gouvernement depuis mai 2012. Tout le monde les connaît, les a bien en tête. Chaque fois elles étaient présentées comme l’ultime concession, l’ultime reculade acceptable. Chaque fois elles ont fini par être avalées. Mais il est temps de siffler la fin de la partie. Maintenant il s’agît de la durée du travail, première source de justice ou d’injustice selon qu’on la réduise ou qu’on l’augmente. Toujours le PS s’est tenue du côté de sa réduction, à présent il est du côté de son augmentation, à présent il se tient aux côtés de la droite. Le doute n’est plus permis. Et toute acceptation nouvelle de votre part à l’égard du gouvernement constituerait l’aveu de votre propre conversion à l’idéologie libérale et conservatrice de droite.
Car accepter l’augmentation de la durée du travail c’est accepter de marcher à contre temps de l’histoire, du progrès, des gains de productivité observés depuis que l’homme chasse, cultive, produit. C’est accepter d’annuler les acquis et les avancées en matière « d’équilibre » du rapport de force au sein du monde du travail au profit des détenteurs capitalistiques de l’outil de production. Hier c’était les patrons qui le détenaient. Aujourd’hui ce sont les fonds de pensions. Accepter l’augmentation de la durée de cotisations c’est accepter de leur livrer 150 ans de luttes syndicales et citoyennes. Comme c’est
accepter la capitalisation du bien le plus précieux du travailleur: son droit à finir sa vie dignement et en sécurité.
Ce projet de précarisation des salariés au profit du renforcement des marchés financiers était celui de Nicolas Sarkozy. Il avait annoncé la couleur et avait présidé la France dans ce sens.
A force de mobilisations et d’explications quant à l’aspect rétrograde et mortifère de son projet, il a été battu. Et vous, militants du PS, vous y avez également contribué. Souvenez-vous. Le point d’orgue de votre contribution se situait même dans le courant de l’année 2010 quand, avec des millions d’autres, vous refusiez une énième réforme d’allongement de la durée du travail, une énième augmentation de la durée des cotisations. Même
vos chefs aujourd’hui ministres se tenaient à vos côtés. Ils brandissaient les mêmes pancartes que vous, scandaient les mêmes slogans que vous. Le 27 août 2013
ils vous ont trahis. Pire, ils vous ont abandonné. Sinon ils auraient quitté le gouvernement dès l’annonce de Jean-Marc Ayrault de nous faire travailler 43 ans. Mais ils y siègent toujours.
L’allongement de la durée du travail constitue le tabou ultime pour un militant de gauche. Comme sa réduction constitue le tabou du militant de droite. Ces militants accepteraient-ils de poursuivre leur militantisme dans une UMP qui réduirait la durée hebdomadaire du travail ou la durée des cotisations eux qui pensent qu’il faut travailler toujours plus pour gagner toujours moins? En restant à partir d’aujourd’hui au PS vous ferez le choix d’épouser un modèle de société identique à celui rêvé par un militant UMP.
La réduction du temps de travail a toujours, absolument toujours été la pierre angulaire de tous les combats syndicaux, de toutes les revendications sociales. Comme elle a toujours été ses plus belles conquêtes. L’école obligatoire a réduit le temps de travail des enfants. Le passage progressif de la journée de 14 heures à celle de 7 heures a réduit le temps de travail. Le repos dominical a réduit le temps de travail. Les congés payés ont réduit le temps de travail. L’instauration de la retraite, puis l’abaissement de l’âge légal de départ ou de la durée de cotisations ont réduit le temps de travail. Chaque fois il s’agissait d’un gain, d’un progrès capital obtenu par la gauche contre la droite.
Vous voilà donc à l’heure du choix, au pied du mur : poursuivre votre militantisme dans un parti de droite qui défend l’allongement de la durée du travail ou bien rentrer à la maison, celle qui continue de penser, en dépit des violents coups de buttoir portés contre elle par les forces de droite les plus réactionnaires, que la gauche c’est la défense des conditions de travail et le progrès social.
A celles et ceux encore hésitants, qui estiment qu’il reste encore un idéal de progrès qui ancrerait le PS à gauche, à l’instar de la loi légalisant enfin le mariage pour tous, nous leurs rappelleront que même en Grande Bretagne, pays dirigé par les plus féroces libéraux conservateurs, une telle loi a été votée en moins de temps qu’il ne faut pour le dire, avec moins de tergiversation que notre président de la République.
Sydne93, un ancien militant socialiste qui, au pied du mur, a choisi.
